
Il ne faut pas oublier le futur – Bourse de recherche et de production ADAGP / Bétonsalon 2025
No Anger
Le comité artistique de la bourse ADAGP/Bétonsalon s’est réuni le 10 juin 2025 et a choisi No Anger comme lauréat·e. Iel est le·la huitième artiste à bénéficier de cette bourse après franck leibovici (2017), Liv Schulman (2018), Euridice Zaituna Kala (2019), Anne Le Troter (2021), Abdessamad El Montassir (2022), le duo Irma Name (2023) et Florian Fouché (2024).
La bourse de recherche ADAGP/Bétonsalon est une dotation de 15 000€ destinée à soutenir un·e artiste dans un travail de recherche sur plusieurs mois. Bétonsalon accompagne l’artiste dans son processus de recherche et de production, l’artiste reçoit 4 000€ d’honoraires et 8 000€ pour la production.
Le projet artistique
Il ne faut pas oublier le futur
Comment les corps dissidents peuvent-ils perturber une écriture patriarcale du futur, résister, et faire de l’espoir un acte politique ? Convoquant la figure du cyborg, celle de Donna Haraway, No Anger souhaite proposer des récits alternatifs aux rapports de subordination humain/machine, à travers l’expéri- mentation de formes de codépendance et d’hybridité qui échappent aux visions normatives et validistes des technologies. Il s’agira notamment de repenser la mise en récit des destins assignés aux corps marginalisés et invisibilisés à travers des stratégies cyber-féministes de hacking qui mettent en déroute les ontologies et temporalités dominantes.
Rejoignant les réflexions de Nathalie Magnan sur la construction médiatique des identités jugées subversives, cette recherche vise à mettre en lumière les contre-visualités que génèrent les médias tactiques investis par les collectifs activistes, ainsi que les représentations d’un commun minoritaire qu’ils participent à forger et diffuser. Envisageant le piratage et la viralité comme outils pour faire dérailler, contaminer et reconfigurer des réseaux et structures institutionnelles dysfonctionnels, ce projet vise à cripper nos imaginaires par l’exploration de « futurographies » en rupture avec les schémas binaires et technophobes. À travers l’intersection des expériences lesbienne, queer et handie, No Anger entend questionner la perception et l’encodage d’« états de corps » basés sur une relation de complémentarité et de réciprocité avec les technologies qui accompagnent et structurent son quotidien.
Reprenant la grammaire visuelle du film Lesborama (1995) de Nathalie Magnan et de l’émission L’Œil du Cyclone (diffusé sur Canal+ de 1991 à 2000), No Anger réalisera un film qui combine extraits d’archives écrites et filmiques du fonds Nathalie Magnan et expérimentations textuelles, vocales et performatives co-construites avec un robot. Profondément ancrée dans des récits personnels, cette œuvre tracera de multiples filiations à partir de témoignages de personnes concernées par ces enjeux, permettant ainsi de croiser des visions de futurs désirables et émancipatrices au sein de diverses communautés et contextes historiques.
No Anger
À travers sa pratique artistique qui mêle vidéo, performance et écriture, No Anger interroge les modes d’expression et de monstration des corps. Inscrits dans un langage et un imaginaire communs, traversés par des rapports de domination, les mots et les images véhiculent une vision du monde qui légitime certaines réalités par rapport à d’autres, hiérarchisant les corps entre eux. No Anger vise à exprimer l’expérience de corps minorisés qui s’affranchissent de leur monstration hégémonique, tout en explorant la notion d’hybridité et les façons dont les prothèses machiniques, loin d’amplifier ou de remplacer les corps, peuvent ouvrir d’autres possibles de création.
Depuis 2015, iel tient un blog intitulé À mon geste défendant, dans lequel iel développe, à partir des pensées féministes et queer et de sa propre expérience, une critique du validisme. En 2019, iel obtient un doctorat en sciences politiques à l’École Normale Supérieure de Lyon. Dans sa thèse, iel analyse comment l’imaginaire hégémonique a un impact sur la perception des corps et des sexualités des femmes et des personnes queer ; et comment cette lecture hégémonique peut être contestée. S’appuyant sur ses recherches universitaires, le travail artistique de No Anger explore le potentiel de son corps lesbien et handicapé, proposant de réinventer l’imaginaire. En 2022, iel co-fonde, avec Lucie Camous, le collectif Ostensible, structure de recherche-création dédiée aux disability et crip studies qui mène une réflexion intersectionnelle autour du validisme.
Lauréatx du Prix Utopi-e 2023, No Anger a présenté ses performances et ses œuvres à l’ENS Lyon, au MAC VAL – Musée d’Art Contemporain du Val-de- Marne, à Bétonsalon – centre d’art et de recherche, au Palais de Tokyo, au Centre Pompidou (Paris), au Mucem (Marseille), à Silent Green Film Feld Forschung (Berlin), aux Magasins Généraux (Pantin), au Centre Régional d’Art Contemporain de Sète, au T2G (Gennevilliers).
L’ADAGP
Créée en 1953, l’ADAGP est une société française de perception et de répartition des droits d’auteur. Elle intervient dans le domaine des arts visuels.
Forte d’un réseau mondial de 55 sociétés sœurs, elle représente aujourd’hui plus de 260 000 artistes dans toutes les disciplines : peinture, sculpture, photographie, architecture, design, bande dessinée, manga, illustration, street art, création numérique, art vidéo, etc.
De plus, l’ADAGP encourage la scène artistique en initiant et en soutenant financièrement des projets propres à animer et valoriser la création, et à en assurer la promotion à l’échelle nationale et internationale.
Les Archives de la critique d’art
Les Archives de la critique d’art (ACA) articulent leurs missions et leurs activités autour de la critique d’art française et internationale. En conservant la mémoire de l’actualité et des discours de l’art depuis 1945 jusqu’à aujourd’hui, les ACA favorisent le développement de la recherche sur l’art contemporain et ses acteurs, ses réseaux, ses formes de médiation, ses institutions en France et à l’étranger. Des programmes de recherche permettent l’exploitation et la valorisation scientifique de ces ressources dans le cadre de manifestations telles que des colloques, des expositions, des rencontres publiques organisées en partenariat avec d’autres institutions et acteurs culturels ; et ce sur des territoires qui s’étendent du local à l’international en passant par le national. Depuis 1993, la revue semestrielle bilingue CRITIQUE D’ART, éditée par les ACA, commente l’actualité des publications françaises et internationales sur l’art contemporain avec les contributions de plus de 80 rédactrices et rédacteurs par numéro. La collection INHA –Archives de la critique d’art porte le label Collex-Persée, attribué aux collections patrimoniales d’excellence.
Le comité artistique 2025
Mathilde Belouali, directrice du centre d’art contemporain Les Capucins, ville d’Embrun
Peggy Pierrot, travailleuse intellectuelle et enseignante à l’erg, Bruxelles Émilie Renard, directrice de Bétonsalon, Paris
Shanta Rao, artiste, membre de l’ADAGP
Marie Tchernia-Blanchard, directrice des Archives de la critique d’art, maîtresse de conférences en histoire de l’art contemporain, Université Rennes 2
La bourse de recherche et de production ADAGP / Bétonsalon
Cette bourse de recherche vise à soutenir le travail d’un·e artiste sur des questions de représentation, de production et de circulation des images à partir de fonds d’archives. La 8ème édition de cette bourse permettra à No Anger de développer un travail de recherche et de production à partir du fonds Nathalie Magnan (INHA-Collection Archives de la critique d’art, Rennes).
Son travail sera présenté à l’occasion d’une double exposition consacrée à l’héritage de Nathalie Magnan au centre d’art contemporain Les Capucins, à Embrun dans les Hautes-Alpes puis à Bétonsalon, au second semestre de 2026.