En 1999, à l’issue d’un débat sur la représentation de la diversité dans le cinéma lesbien au Festival Cineffables, la prise de parole d’une gérante de bar connue pour ses discriminations au faciès déclenche l’indignation. En réaction, une quarantaine de lesbiennes issues « des migrations forcées, des colonisations (passées et présentes) et des descendantes de l’esclavagisme » se réunissent le 6 novembre, et décident de s’organiser pour « dénoncer les pratiques discriminatoires touchant les espaces festifs nocturnes » et « l’antiracisme humanisme de salon » qui caractérise le milieu lesbien. Pendant cinq ans, elles organiseront des évènements et rencontres à La Barbare, espace autogéré non-mixte à Bagnolet, et publieront un recueil de textes ainsi qu’une anthologie, Warriors/Guerrières (2001) pour faire connaître les œuvres des autrices et artistes lesbiennes racisées, étasuniennes ou francophones.
Nawo Crawford, activiste, et Paola Bacchetta, activiste et professeure d’études de genre et d’études féministes à l’Université de Californie à Berkeley (en ligne), échangeront à propos de leurs expériences au sein du Groupe du 6 Novembre, et de ses prolongements dans leurs vies et actions.
Nawo Carole Crawford, en tant que lesbienne racisée vivant en France, sait par expérience ce que c’est de ne pas être pleinement vue, compris·e, accepté·e dans notre authenticité, avec notre riche identité multiple. C’est pourquoi, elle est une activiste de longue date qui lutte pour les droits des femmes, des lesbiennes, des LGBTQ racisé·es et aussi, une activiste panafricaine, qui lutte pour l’indépendance de l’Afrique et contre le racisme envers les personnes de descendance africaine, les personnes de la diaspora africaine. Ainsi, quand elle était membre du Paris Black Pride entre 2017 et 2019, Nawo a voulu donner une plus grande visibilité aux LGBTQ racisé·es en France.
Paola Bacchetta est professeure et vice-chair pour la recherche au département d’études sur le genre à l’Université de Californie, Berkeley. Elle est la première directrice du Berkeley Gender Consortium, et dirige actuellement l’Institute for Gender and Sexuality Research. Ses livres incluent : Co-Motion : On Feminist and Queer Solidarities (à paraître, Duke) ; Fatima Mernissi For Our Times, coédité avec Minoo Moallem (Syracuse) ; Global Raciality : Empire, Postcoloniality, and Decoloniality, co-édité avec S. Maira, H. Winant (Routledge, 2019) ; Femminismi Queer Postcoloniali (coédité avec L. Fantone : Ombre Corte, 2015) ; Gender in the Hindu Nation (Women Ink, 2004) ; Right-Wing Women (co-édité avec M. Power, Routledge, 2002). Elle a publié 70 articles et chapitres de livres sur la théorie féministe, lesbienne et queer transnationale, la théorie décoloniale et les mouvements lesbiens et queers racisées. Activiste depuis longtemps, elle est co-coordinatrice du Decolonizing Sexualities Network.